SANTE/ Coronavirus : où en sont les traitements ?

25 septembre 2020 | AUTEUR/MISE EN COHERENCE: | AFRIQUE/SOCIAL / SANTÉ, MONDE/SOCIAL / SANTÉ, RECOMMANDE, SANTE & TECHNOLOGIES MEDICALES | Aucun commentaire   //   vue(s) 2120 fois

 

Même si aucun médicament n’est à lui seul « révolutionnaire », les thérapies mises au point et l’amélioration des procédures de soins semblent réduire le taux de mortalité.

 

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S’il nous est déjà difficile de suivre le tourbillon de nouvelles informations qui entoure la pandémie de coronavirus, on ne peut qu’imaginer la confusion dans laquelle se trouve Adarsh Bhimraj. En plus du nombre croissant de nouveaux cas auquel il doit faire face, ce médecin de la clinique de Cleveland fait également partie d’une équipe de 16 personnes chargée d’établir les directives de l’Infectious Diseases Society of America en matière de traitement de la COVID-19.

 

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Entre les patients de cet hôpital de l’Ohio et l’infection bénigne au coronavirus qu’il a lui-même contractée, Bhimraj a dû trouver le temps d’analyser le flot continu de nouveaux traitements contre la COVID-19. À travers le monde, plus d’un millier d’essais cliniques randomisés de traitements contre la maladie à coronavirus sont menés par différentes équipes de chercheurs. Le rôle du comité dont fait partie Bhimraj est de naviguer à travers ce torrent d’informations pour ne retenir que les résultats prometteurs.

 

Aussi incertaines soient-elles, les connaissances sur le fonctionnement et le traitement du coronavirus s’accumulent lentement mais sûrement. Huit mois après le début de la pandémie, les méthodes pour lutter contre la maladie sont de mieux en mieux cernées par les médecins. Certaines thérapies ont recours à de tout nouveaux médicaments alors que d’autres font appel à des stratégies dont l’efficacité et la sûreté dans le traitement de maladies tierces ont déjà été prouvées au cours d’essais cliniques.

 

D’autres améliorations sont le fruit de subtiles modifications apportées aux soins standards. Petit à petit, toutes ces stratégies sauvent des vies. « Aucune de ces thérapies n’est, pour reprendre les mots d’Anthony Fauci, “révolutionnaire”, » indique Bhimraj, en référence à la déclaration faite par le directeur de l’Institut national des allergies et des maladies infectieuses (NIAID) des États-Unis. « Mais elles laissent entrevoir une utilité certaine. »

 

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Les médecins interrogés par National Geographic rappellent qu’en matière de traitement contre la COVID-19, aucune solution miracle n’a été découverte à ce jour. Il faudra du temps pour parfaire les thérapies fondées sur les antiviraux, les anticorps ou le renforcement du système immunitaire. Même le vaccin tant attendu ne stoppera pas totalement le virus dans sa progression et pour ce qui est des effets au long terme de la maladie, ils restent encore méconnus.

 

« Pour l’instant, il nous manque beaucoup de réponses, et nous allons devoir composer avec ce problème dans le monde entier pendant une année ou deux encore, » déclare Stephen Holgate, immunopharmacologue à l’université de Southampton. « Il sera très important de disposer de toute une gamme de traitements — et des essais cliniques démontrant leur efficacité, ce qui est primordial. »

 

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_ UN ESSAI SIMPLIFIÉ

Parmi les centaines d’initiatives visant à homologuer des traitements contre la COVID-19, celle menée par l’université d’Oxford semble jouer le rôle de porte-drapeau pour ce qui est de distinguer le mythe de la réalité. Baptisé RECOVERY (Randomised Evaluation of COVID-19 therapy), cet essai clinique randomisé a pour but de tester l’efficacité de différentes thérapies contre la maladie à coronavirus au Royaume-Uni.

 

L’un des médicaments figurant sur la liste des potentiels traitements est un stéroïde appelé dexaméthasone. La COVID-19 peut déclencher une réponse immunitaire excessive et, comme tout autre stéroïde, la dexaméthasone est capable d’atténuer et de modifier cette réaction. Le 16 juin, l’université d’Oxford publiait ses premiers résultats sur la dexaméthasone et montrait que chez les patients COVID-19 placés sous oxygène ou respirateur artificiel, l’utilisation de ce médicament divisait par trois le risque de mortalité par rapport aux traitements classiques seuls. Pour les personnes atteintes d’une forme plus modérée de la maladie ne nécessitant pas un placement sous oxygène, la dexaméthasone ne semble pas être utile et pourrait même aggraver leur condition. Néanmoins, pour les cas les plus sévères, la dexaméthasone constitue une ligne de vie potentielle.

 

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« Nous avons annoncé les résultats à l’heure du déjeuner et quelques heures plus tard, les médecins-chefs ici au Royaume-Uni se rendaient dans tous les hôpitaux pour leur recommander d’adopter ce traitement comme pratique standard, » rapporte Martin Landray, cardiologue de l’université Oxford et co-investigateur en chef pour l’essai RECOVERY. « Et même si je ne peux pas le prouver, je pense que cette initiative a permis de sauver des vies dès le week-end qui a suivi l’annonce. » L’étude a été officiellement publiée dans le New England Journal of Medicine le 17 juillet.

 

Si Bhimraj fait aujourd’hui l’éloge de l’essai RECOVERY, c’est en partie pour son ambition et parce que l’annonce dans les médias de sa découverte a été suivie de résultats convaincants. « Je ne fais pas attention aux prépublications ; les communiqués de presse nous donnent du fil à retordre, » dit-il, en référence aux annonces médiatiques de traitements prometteurs restées plusieurs mois sans suite.

 

Comment RECOVERY a-t-il fait pour apporter des réponses claires là où les autres essais de l’ère COVID-19 ont échoué ? D’après Landray,  entre la longueur et la complexité des formulaires de consentement et le volume colossal de données à recueillir pour chaque patient, le lancement d’essais cliniques est devenu une procédure laborieuse. De son côté, RECOVERY a été conçu pour être pragmatique, réduit au strict minimum, afin de recruter le plus de patients possible, un avantage de taille pour un essai clinique, car plus l’échantillon est grand, plus les chercheurs auront de chances d’observer un signal vérifiable de l’efficacité d’un traitement. En partenariat avec le National Health Service (NHS) du Royaume-Uni, l’essai RECOVERY est parvenu à recruter 15 000 patients environ à ce stade, soit un sixième des cas de COVID-19 hospitalisés au Royaume-Uni depuis le début de l’essai selon Landray.

 

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Le 25 juin, l’Infectious Diseases Society of America a mis à jour ses directives thérapeutiques en y intégrant la recommandation conditionnelle d’utilisation de la dexaméthasone et le National Institutes of Health des États-Unis lui a emboîté le pas en l’ajoutant à ses propres directives. Bien que la dexaméthasone ne soit pas un médicament approuvé par la Food and Drugs Administration des États-Unis dans le traitement de la COVID-19 (aucun médicament ne l’est), ce stéroïde est le premier dont l’efficacité dans l’augmentation du taux de survie à la COVID-19 a été démontrée. Vendu 25 $ (21 €) le flacon aux États-Unis, la demande pour ce médicament peu onéreux a augmenté si fortement en si peu de temps que les pharmacies américaines signalent actuellement des pénuries.

 

Covid-19 : le Royaume-Uni autorise la dexaméthasone - Libération

 

L’objectif de l’essai RECOVERY n’est pas uniquement de mettre en avant les traitements efficaces, il se propose également d’identifier les potentiels traitements qui se révéleraient infructueux. Au mois de juin, les chercheurs annonçaient les résultats d’une étude menée sur un échantillon de 4 716 patients portant sur l’hydroxychloroquine, le médicament antipaludique qui avait reçu le soutien de différents chefs d’État parmi lesquels le président des États-Unis, Donald Trump, et celui du Brésil, Jair Bolsonaro. Publiés le 15 juillet avant même leur évaluation par des paris, ces résultats suggéraient que l’hydroxychloroquine n’apportait aucun bénéfice clinique apparent dans le traitement de la COVID-19, une conclusion ralliée par plusieurs autres études.

 

Même s’il a déjà clarifié l’utilité d’un certain nombre de médicaments, l’essai RECOVERY se doit encore de répondre à de multiples questions. Landray nous fait part de sa volonté de tester le traitement au plasma convalescent, une transfusion riche en anticorps faisant intervenir le sang de patients COVID-19 guéris. Aux États-Unis, ce traitement a récemment obtenu une autorisation d’urgence sur la base de résultats controversés mais RECOVERY devra attendre l’automne pour lancer son propre essai, période à laquelle le nombre de cas et de potentielles recrues devrait repartir à la hausse avec l’arrivée anticipée d’une nouvelle vague hivernale de la pandémie.

 

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_ À VENIR

L’une des premières pistes à avoir vu le jour dans la chasse aux traitements contre le coronavirus était axée sur le remdésivir, un antiviral qui réduirait le temps de guérison lorsqu’il est administré aux malades de la COVID-19. En outre, les chercheurs explorent les stratégies qui permettraient de renforcer la réponse antivirale naturelle de notre organisme et s’intéressent à ce titre au traitement à base d’interféron bêta, une protéine du système immunitaire humain.

 

Normalement, lorsqu’une cellule est infectée par un virus, elle libère différentes versions d’interférons dont le rôle est d’inviter les cellules voisines à se défendre contre les agents pathogènes en produisant un cocktail de substances antivirales. Toutefois, le SARS-CoV-2 semble être passé maître dans l’art de tromper cette alarme à interférons. Par conséquent, la réponse initiale déclenchée dans les poumons reste limitée, ce qui permet au virus de poursuivre son chemin sans être inquiété. La nouvelle de ce phénomène a attiré l’attention de Synairgen, une société britannique de biotechnologies. Depuis plusieurs années, Synairgen développe un aérosol d’interférons bêta visant à aider les patients atteints de maladies pulmonaires obstructives chroniques ou d’asthme sévère à mieux combattre les infections virales.

 

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Le 20 juillet, à l’occasion d’une présentation aux investisseurs, les représentants de Synairgen ont annoncé les résultats d’un essai randomisé mené sur 101 sujets hospitalisés : le risque de mortalité ou de recours à une ventilation invasive était inférieur de 79 % pour les patients soumis à un traitement aux interférons bêta, par rapport au traitement standard. Les patients ayant reçu des interférons bêta ont également guéri en plus grand nombre et ont été moins nombreux à signaler un essoufflement.

 

« En toute honnêteté, nous avons été surpris par l’efficacité de ce traitement, » déclare Holgate de l’université de Southampton, également cofondateur de Synairgen. « On comprend bien qu’en administrant ce traitement au premier stade de la maladie, alors que le virus s’installe dans les poumons, on obtienne des résultats probants ; mais en fait on peut également éviter aux patients un placement sous respirateur et même accélérer leur guérison. »

 

Bien que les statistiques semblent prometteuses, ce premier essai porte sur un échantillon restreint et les chercheurs ne peuvent donc pas s’assurer outre mesure de l’efficacité du médicament. Holgate nous informe que Synairgen procède actuellement à un recrutement en vue d’un essai clinique élargi à domicile prévu cet automne. D’autres études suggèrent que l’efficacité des interférons dans le traitement de la COVID-19 dépendrait fortement du timing : utilisés trop tard, ils ne présenteraient qu’un intérêt limité et risqueraient même d’aggraver l’état des patients atteints d’une forme avancée de la maladie en augmentant l’inflammation. Ce facteur temps est la raison pour laquelle Holgate était si surpris des résultats positifs de l’essai initial.

 

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_ UNE SOLUTION RENVERSANTE

Les innovations pharmaceutiques ne sont pas l’unique source d’espoir dans le traitement de la maladie à coronavirus. Les mesures basiques de prévention telles que le port du masque, la distanciation sociale et le lavage des mains jouent un rôle tout aussi important. Les plus amples connaissances dont disposent aujourd’hui les médecins au sujet de la maladie et des stratégies thérapeutiques ont sans aucun doute contribué à réduire la mortalité un peu partout dans le monde lors du début de deuxième vague épidémique de cet été. « Il est vrai que les médicaments comme le remdésivir et les stéroïdes sont très utiles, mais il ne faut pas pour autant oublier l’importance des soins médicaux et intensifs, » observe Helen Boucher, directrice du service de géographie médicale et des maladies infectieuses du Tufts Medical Center de Boston, dans le Massachusetts.

 

Prenons par exemple la ventilation invasive. Cette procédure a sauvé de nombreux patients COVID-19, mais elle n’est pas sans risque : la pression exercée par la ventilation peut endommager les poumons, sans oublier le choc et l’inconfort associés à une telle situation avec l’intubation et l’inquiétude quant à la survie d’un proche qui peuvent entraîner un trouble de stress post-traumatique. Les chercheurs ont donc choisi d’explorer les différentes façons de limiter les dégâts et la détresse liés à l’intubation par le biais de méthodes moins invasives permettant d’améliorer la respiration des patients ainsi que leur taux de saturation en oxygène. « L’erreur fréquente est de s’emballer en poursuivant des objectifs qui peuvent sembler ésotériques au détriment des méthodes éprouvées, » indique Christian Bime, chercheur et directeur médical de l’unité de soins intensifs de l’université d’Arizona. « Les bons vieux procédés thérapeutiques peuvent paraître ennuyeux, mais ils fonctionnent ! »

 

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Ces techniques dites de la vieille école ont été mises au point pour une maladie appelée syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), dont les symptômes reflètent les lésions pulmonaires observées chez les cas les plus graves de COVID-19. Par exemple, Bime et ses collègues ont rencontré un franc succès avec une méthode héritée de la SDRA appelée ventilation protectrice qui implique d’ajuster les réglages ventilatoires afin de limiter la pression et le volume d’air insufflé dans les poumons, ce qui atténue la déformation pulmonaire à l’origine des lésions. Bime évoque également la surprenante réussite d’une autre technique facile à mettre en œuvre : allonger les patients COVID-19 sur leur estomac. « C’est l’une des méthodes que nous avons trouvé très, très utile chez l’ensemble des patients COVID, » déclare-t-il.

 

La position à plat ventre, également appelée décubitus ventral, améliore la capacité des poumons à transmettre l’oxygène dans le sang. Le cœur se trouve à l’avant de la poitrine, donc le fait de coucher le patient sur son estomac soulage les poumons du poids du cœur. L’arrière des poumons offre une meilleure circulation sanguine et un plus grand nombre de chambres d’échanges gazeux que l’avant, des chambres moins comprimées et plus efficaces à plat ventre. « Il faut une certaine harmonie entre circulation sanguine et échange gazeux, et le fait de mettre le patient à plat ventre maximise cet effet, » indique  Kevin McGurk, médecin-urgentiste en chef du Cook County Health de Chicago, dans l’Illinois.

 

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En réalité, le décubitus ventral n’est pas toujours facile pour des raisons logistiques. Le retournement en toute sécurité d’un patient perfusé et relié à un respirateur peut nécessiter jusqu’à cinq soignants. Exécuté sur des dizaines voire des centaines de patients, ce geste peut être perçu comme une contrainte supplémentaire aux yeux d’un personnel médical déjà surchargé.

 

Néanmoins, à en croire les résultats communiqués dans plusieurs études de cas et analyses en provenance du monde entier, dont une publiée par McGurk, la mise à plat ventre combinée à un placement sous oxygène améliorerait le taux de saturation en oxygène chez les patients COVID-19 éveillés présentant des symptômes modérés. Elle réduirait même le risque pour un patient d’avoir besoin d’une ventilation invasive. « Ce n’est pas un remède miracle, mais force est de constater le nombre remarquable de patients ayant réagi positivement au décubitus ventral, et souvent plutôt rapidement, » ajoute McGurk. « Il n’y a pas vraiment d’inconvénients à demander à une personne éveillée de s’allonger sur le ventre. »

 

(Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.)

 

Source : www.nationalgeographic.fr/ MERCREDI, 2 SEPTEMBRE 2020/ DE MICHAEL GRESHKO

 

https://www.nationalgeographic.fr/sciences/2020/09/coronavirus-ou-en-sont-les-traitements/

 

Chloroquine et coronavirus - Hydroxychloroquine : effets indésirables ? | Santé Magazine

 

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URGENT: Coronavirus COVID-19, UN Confirms First Case | Kapital Afrik

 

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